Je n’ai pas dit mon dernier mot

Retrouvez le témoignagne de Anne-Fanette et Alex CASTAGNIER dans le livre « Je n’ai pas dit mon dernier mot – Le combat d’une mère » paru aux Editions Nombre7 en Décembre 2018.

Extrait :

« – Alors maman, je suis normal ?

Ces mots me cassent en deux, je me demande ce qui se passe dans sa tête, je sais qu’il souffre, mais quelque part, cette souffrance le fait mûrir, comprendre plein de choses, accepter la différence, ne jamais juger…, essayer d’aider les autres au lieu de les enfoncer et s’accrocher, ne jamais s’avouer vaincu… Je réponds tendrement :

– Tu es plus que normal, mon chéri, tous ces examens le prouveront. Tu verras.

Puis je reprends :

– Il y a juste un petit rien qui ne fait pas son travail dans ta tête, mais ce n’est pas grave. On peut vivre avec. Il faut juste être un peu plus courageux que les autres, mais tu l’es, alors il n’y a pas de problème.

Je ne savais plus que lui dire, mes yeux lui hurlaient mon amour, je crois qu’il les a entendus et c’est cela qui l’a réconforté… Je lui ai serré la main, et je l’ai pris tout entier contre moi très fort. Au creux de son oreille, j’ai soulevé ses cheveux encore enduits du gel médical de l’encéphalo, et je lui ai murmuré :

– Je t’aime, je t’aime très fort…, encore plus fort que fort, je t’aimerai toujours comme ça.

– J’ai senti son petit cœur battre sur le mien, la chaleur de sa peau, son souffle. J’ai inspiré tout son être comme une drogue. Le temps a certainement dû s’arrêter pour nous laisser respirer un peu ou pour nous contempler…

(…)

Plus rien ne me fait peur, il y a trop de rage en moi et je n’ai aucun doute. Ce sont eux les incapables qui se prennent pour des grands savants ! Ils ne connaissent pas toutes ces nuits passées à pleurer, à s’indigner, à douter, à ne plus savoir quoi faire, à se sentir misérable au plus profond de son âme, ils ne connaissent pas les angoisses, les incertitudes, la peur, moi je sais trop !

Mon fils, je le connais par cœur, il y a quelques années, les docteurs avaient dit qu’il était lent, en retard, moi, je n’y avais jamais cru…, par parce que c’est mon fils, mais parce que c’était faux, hé bien là c’est pareil. Ce n’est pas parce qu’il a du mal à lire, qu’il est idiot. Il est limité dans son champ de vision, il déforme le relief, et en plus il est dyslexique. Il n’est pas idiot, ça n’a rien à voir avec l’intelligence, c’est un souci praxique, c’est comme si on essayait d’apprendre le chinois : aucun repère pour nous aider. Hé bien ça, les profs ne veulent pas le comprendre… De toute façon, je n’attends plus rien d’eux, ce genre de gamin, ça ne les intéresse pas. Alors avec Axel, on bosse, on n’arrête pas…, un jour tous ces efforts paieront. Il le mérite tant.

(…)

Je pense honnêtement, avoir sauvé mon fils de l’illettrisme auquel il était destiné. L’école de la république n’a pas fait son travail, je trouve ça lamentable. C’est malheureusement le triste constat que je retiens et autre chose aussi : je sais maintenant que l’amour d’une maman est capable de déplacer des montagnes ! »

CASTAGNIER, Anne-Fanette et Alex. Je n’ai pas dit mon dernier mot – Le combat d’une mère. Nombre7 Éditions, Décembre 2018.

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